Interview

Le CIPINA donne, à travers cette rubrique, la parole aux femmes et hommes d’origine africaine qui font l’actualité, qu’ils vivent en Afrique, en Suisse ou ailleurs. Ils s’expriment librement sur les sujets qui interpellent les Africains et livrent leurs opinions sans détours. Vous pouvez réagir à cette interview comme à toutes les autres en nous écrivant à : contact@cipina.org ou en vous rendant sur notre page Facebook : https://www.facebook.com/associationcipina
Bonjour M. Hamdaoui, vous êtes candidat aux prochaines élections fédérales. Qu’est ce qui motive votre candidature ?
Ayant été durant 12 ans correspondant au Palais fédéral pour le compte de différentes radios, je suis un passionné de politique et ai éprouvé l’envie de m’engager activement. J’ai coup sur coup été élu au Parlement de la ville de bienne puis au Grand Conseil bernois. C’est donc tout naturellement que je me mets à disposition de mon parti, le PS, pour ces élections au Conseil national. je connais nombre d’élus, de conseillers fédéraux et de hauts-fonctionnaires. Je ne débarquerais pas en terre inconnue…
Si vous êtes élu, quels sont les chantiers que vous prendriez en mains tout de suite ?
La question de l’intégration me tient particulièrement à cœur, une intégration généreuse (avec des moyens financiers !) mais aussi exigeante (respect de nos lois et de certaines valeurs). la sortie du nucléaire me tient aussi à cœur, de même que le renforcement de nos relations étrangères. Enfin, pour ne citer qu’un troisième exemple, j’aimerais œuvre à améliorer le sort des personnes âgées.
La Ville de Bienne est très cosmopolite comme beaucoup de grandes villes suisses, quel est votre rapport avec la communauté étrangère de cette ville en général ?
J’adore ma ville parce qu’elle est multiculturelle. J’y vis depuis 1967 (j’avais 3 ans) et ai vu y arriver des migrants de tous les continents. J’ai toujours essayé de manière bénévole de les aider à s’intégrer au niveau scolaire ou culturel et ai un immense plaisir à partager leur culture – notamment leur gastronomie. Pour moi, Bienne ville multiculturelle et multiethnique incarne l’avenir. Et la cohabitation se passe bien. Il suffit de voir les excellentes relations qu’ont les enfants issus de différents horizons.
L’immigration africaine en Suisse pose- t-elle, à votre avis, plus de problèmes que les autres immigrations ?
Je ne le pense pas. A Bienne par exemple, les conducteurs de bus et de trolleybus d’origine africaine sont particulièrement appréciés, parce qu’ils font très attention aux personnes âges et handicapées. Le seul éventuel problème au quotidien est parfois posé par des communautés évangéliques africaines qui font du prosélytisme et créent parfois des problèmes de voisinage le dimanche en raison de certaines nuisances sonores…
Vous êtes de confession musulmane et vous l’assumez très bien. Comment cette communauté s’intègre t-elle en Suisse ?
Les musulmans croyants et pratiquants se sentent discriminés. Et je les comprends : leurs lieux de culte sont indignes et ils sont souvent montrés du doigt en raison de leur tenue vestimentaire. Cette situation risque, hélas, de durer aussi longtemps que les conflits au Moyen-Orient se poursuivront. Je me suis battu – en vain – au Grand Conseil bernois pour ouvrir la voie à une reconnaissance des communautés religieuses musulmanes et ai constaté à quel point les préjugés sont nombreux. De mon point de vue, il faut que les musulmans de Suisse se distancient d’organisations qui tiennent des propos ambigus.
Un mot sur la situation politique en Algérie, votre pays d’origine ?
Incertaine. Nul ne sais ce que sera l’après Bouteflika. Ni ce qu’il arrivera lors que la manne pétrolière ne sera plus suffisante pour assurer la paix sociale. Je suis inquiet et n’exclus pas à moyen terme de nouveaux heurts violents.
Suite à ce qui s’est passé au Burkina Faso hier(16 septembre 2015, ndlr), un ami m’a dit « l’Afrique marche sur la tête ». Etes-vous d’accord avec cette assertion ?
Non. Mais trop de pays africains ont des armées qui détiennent des pouvoirs exorbitants et des élites corrompues qui se fichent du peuple. Cela explique pourquoi tant de jeunes tentent leur chance en venant en Europe. Il faudrait que les pays européens luttent davantage contre cette corruption en cessant par exemple d’voir dans leurs banques de l’argent volé aux peuples africains. Je plaide aussi pour la création d’une véritable union des pays africains – par exemple de l’Afrique de l’Ouest – passant par des échanges commerciaux et universitaires bien plus poussés. Mais je reste optimiste : ce continent a un gros potentiel.
Vous êtes un des rares journalistes de couleur à avoir travaillé à la télévision suisse. En cela vous êtes un symbole pour la communauté africaine, comme l’est le nouveau patron du Crédit suisse, Tidjane Thiam. Etre noir ou avoir un patronyme musulman en Suisse est-il un frein pour occuper une haute fonction ou être élu dans un législatif ou exécutif ?
Je ne pense pas que la couleur de peau soit en Suisse un vrai handicap. Je ne l’ai en tout cas jamais ressenti. En revanche, les prénoms et noms à consonance en sont (tout comme d’ailleurs les noms d’origine balkanique). Je l’ai observé lors des élections au Grand Conseil bernois où mon nom avait été bizarrement biffé dans des petits villages qui votaient pourtant socialiste ! Mais je pense malgré tout nécessaire que les jeunes générations puisent avoir des « modèles positifs » qui puissent leur donner confiance en eux. C’est déjà le cas dans le sport ou la musique. Il serait sain que cela soit plus souvent le cas en politique, dans l’économie ou le monde des médias.
Un message à transmettre à la communauté africaine de Suisse ?
Les Africaines et les Africains de Suisse doivent être fiers d’eux, de ce qu’ils apportent à la Suisse – à l’école, à l’Université, dans leurs clubs sportifs, dans leur entreprise ou leur immeuble. Mais ils doivent aussi être respectueux de celles et ceux qui sont arrivés ici avant eux. C’est à ce prix que la cohabitation entre les habitants de ce pays continuera d’être harmonieuse.
Interview réalisée par Tidiane Diouwara, Directeur de la rédaction du BIC (Bulletin d'information du CIPINA), newsletter mensuelle sur l'actualité positive du continent.
Bonjour M. Hamdaoui, vous êtes candidat aux prochaines élections fédérales. Qu’est ce qui motive votre candidature ?
Ayant été durant 12 ans correspondant au Palais fédéral pour le compte de différentes radios, je suis un passionné de politique et ai éprouvé l’envie de m’engager activement. J’ai coup sur coup été élu au Parlement de la ville de bienne puis au Grand Conseil bernois. C’est donc tout naturellement que je me mets à disposition de mon parti, le PS, pour ces élections au Conseil national. je connais nombre d’élus, de conseillers fédéraux et de hauts-fonctionnaires. Je ne débarquerais pas en terre inconnue…
Si vous êtes élu, quels sont les chantiers que vous prendriez en mains tout de suite ?
La question de l’intégration me tient particulièrement à cœur, une intégration généreuse (avec des moyens financiers !) mais aussi exigeante (respect de nos lois et de certaines valeurs). la sortie du nucléaire me tient aussi à cœur, de même que le renforcement de nos relations étrangères. Enfin, pour ne citer qu’un troisième exemple, j’aimerais œuvre à améliorer le sort des personnes âgées.
La Ville de Bienne est très cosmopolite comme beaucoup de grandes villes suisses, quel est votre rapport avec la communauté étrangère de cette ville en général ?
J’adore ma ville parce qu’elle est multiculturelle. J’y vis depuis 1967 (j’avais 3 ans) et ai vu y arriver des migrants de tous les continents. J’ai toujours essayé de manière bénévole de les aider à s’intégrer au niveau scolaire ou culturel et ai un immense plaisir à partager leur culture – notamment leur gastronomie. Pour moi, Bienne ville multiculturelle et multiethnique incarne l’avenir. Et la cohabitation se passe bien. Il suffit de voir les excellentes relations qu’ont les enfants issus de différents horizons.
L’immigration africaine en Suisse pose- t-elle, à votre avis, plus de problèmes que les autres immigrations ?
Je ne le pense pas. A Bienne par exemple, les conducteurs de bus et de trolleybus d’origine africaine sont particulièrement appréciés, parce qu’ils font très attention aux personnes âges et handicapées. Le seul éventuel problème au quotidien est parfois posé par des communautés évangéliques africaines qui font du prosélytisme et créent parfois des problèmes de voisinage le dimanche en raison de certaines nuisances sonores…
Vous êtes de confession musulmane et vous l’assumez très bien. Comment cette communauté s’intègre t-elle en Suisse ?
Les musulmans croyants et pratiquants se sentent discriminés. Et je les comprends : leurs lieux de culte sont indignes et ils sont souvent montrés du doigt en raison de leur tenue vestimentaire. Cette situation risque, hélas, de durer aussi longtemps que les conflits au Moyen-Orient se poursuivront. Je me suis battu – en vain – au Grand Conseil bernois pour ouvrir la voie à une reconnaissance des communautés religieuses musulmanes et ai constaté à quel point les préjugés sont nombreux. De mon point de vue, il faut que les musulmans de Suisse se distancient d’organisations qui tiennent des propos ambigus.
Un mot sur la situation politique en Algérie, votre pays d’origine ?
Incertaine. Nul ne sais ce que sera l’après Bouteflika. Ni ce qu’il arrivera lors que la manne pétrolière ne sera plus suffisante pour assurer la paix sociale. Je suis inquiet et n’exclus pas à moyen terme de nouveaux heurts violents.
Suite à ce qui s’est passé au Burkina Faso hier(16 septembre 2015, ndlr), un ami m’a dit « l’Afrique marche sur la tête ». Etes-vous d’accord avec cette assertion ?
Non. Mais trop de pays africains ont des armées qui détiennent des pouvoirs exorbitants et des élites corrompues qui se fichent du peuple. Cela explique pourquoi tant de jeunes tentent leur chance en venant en Europe. Il faudrait que les pays européens luttent davantage contre cette corruption en cessant par exemple d’voir dans leurs banques de l’argent volé aux peuples africains. Je plaide aussi pour la création d’une véritable union des pays africains – par exemple de l’Afrique de l’Ouest – passant par des échanges commerciaux et universitaires bien plus poussés. Mais je reste optimiste : ce continent a un gros potentiel.
Vous êtes un des rares journalistes de couleur à avoir travaillé à la télévision suisse. En cela vous êtes un symbole pour la communauté africaine, comme l’est le nouveau patron du Crédit suisse, Tidjane Thiam. Etre noir ou avoir un patronyme musulman en Suisse est-il un frein pour occuper une haute fonction ou être élu dans un législatif ou exécutif ?
Je ne pense pas que la couleur de peau soit en Suisse un vrai handicap. Je ne l’ai en tout cas jamais ressenti. En revanche, les prénoms et noms à consonance en sont (tout comme d’ailleurs les noms d’origine balkanique). Je l’ai observé lors des élections au Grand Conseil bernois où mon nom avait été bizarrement biffé dans des petits villages qui votaient pourtant socialiste ! Mais je pense malgré tout nécessaire que les jeunes générations puisent avoir des « modèles positifs » qui puissent leur donner confiance en eux. C’est déjà le cas dans le sport ou la musique. Il serait sain que cela soit plus souvent le cas en politique, dans l’économie ou le monde des médias.
Un message à transmettre à la communauté africaine de Suisse ?
Les Africaines et les Africains de Suisse doivent être fiers d’eux, de ce qu’ils apportent à la Suisse – à l’école, à l’Université, dans leurs clubs sportifs, dans leur entreprise ou leur immeuble. Mais ils doivent aussi être respectueux de celles et ceux qui sont arrivés ici avant eux. C’est à ce prix que la cohabitation entre les habitants de ce pays continuera d’être harmonieuse.
Interview réalisée par Tidiane Diouwara, Directeur de la rédaction du BIC (Bulletin d'information du CIPINA), newsletter mensuelle sur l'actualité positive du continent.